Enquête en harcèlement
CIDFP2025-02-18T15:56:30+01:00Guide complet pour une méthodologie rigoureuse et conforme aux recommandations du Défenseur des droits (février 2025) pour mener une enquête en harcèlement

L’enquête en harcèlement est un outil indispensable pour lutter contre le harcèlement moral, sexuel, sexite et discriminatoire. De nombreux salariés, membres du CSE et employeurs se retrouvent démunis face aux situations de harcèlement, faute de repères clairs et de méthodologie adaptée. Face à cette réalité,À la suite de nombreuses réclamations concernant les enquêtes internes sur le harcèlement moral et le harcèlement sexuel, la Défenseure des droits a émis 49 recommandations afin d’harmoniser les pratiques et de combler les lacunes du Code du travail.
L’objectif de cet article est de reprendre ces recommandations en les enrichissant par des explications détaillées, afin de fournir une approche pratique et complète pour la mise en œuvre des enquêtes internes. En s’appuyant sur ces recommandations, ce guide offre un cadre opérationnel pour les employeurs, les responsables RH et les enquêteurs internes, garantissant ainsi un traitement efficace et équitable des signalements de harcèlement.
Pourquoi mener une enquête interne dans l’entreprise ?
L’employeur a une obligation légale de mener une enquête interne en cas de signalement de harcèlement, découlant de son devoir de sécurité (article L.4121-1 du Code du travail) et de la lutte contre le harcèlement moral ( et les discriminations (loi n°2008-496 du 27 mai 2008). La jurisprudence, notamment l’arrêt de la Cour de cassation du 29 juin 2011 (n°09-70.902), impose à l’employeur d’enquêter dès qu’un salarié allègue des faits de harcèlement ou de discrimination, afin de prévenir les risques psychosociaux et de respecter son obligation de protéger la santé mentale des travailleurs. L’enquête doit être engagée dans un délai raisonnable après le signalement, même si les faits sont anciens ou en l’absence de preuves directes, car le non-recours expose l’employeur à des sanctions judiciaires pour manquement à son obligation de sécurité (Cass. soc., 23 mars 2022, n°20-23.272).
Quel est l’objectif de l’enquête interne ?
L’objectif principal de l’enquête interne est de établir la réalité des faits en recueillant un faisceau d’indices convergents, conformément au principe d’aménagement de la charge de la preuve (article 4 de la loi n°2008-496). L’enquête vise à identifier les responsables, protéger les victimes (via des mesures conservatoires comme l’éloignement du mis en cause), et prévenir la récidive. Elle permet également à l’employeur de justifier d’éventuelles sanctions disciplinaires proportionnées (article L.1332-4 du Code du travail) et d’éviter sa propre responsabilité civile ou pénale pour inertie. Le rapport d’enquête doit être rigoureux et impartial pour résister à un contentieux, comme le rappelle la Cour de cassation (Cass. soc., 8 janvier 2020, n°18-20.151).
Quel risque en cas d’absence d’enquête ?
Position de la jurisprudence : En cas de signalement de faits de harcèlement, l’employeur doit en vérifier immédiatement la réalité, la nature et l’ampleur, en diligentant les enquêtes et investigations nécessaires, car en restant inactif il risque de se voir reprocher une abstention fautive au regard de son obligation de sécurité (Cass. soc., 27 nov. 2019, nº 18-10.551 ; Cass. soc., 29 juin 2011, nº 09-70.902).
Alerte en harcèlement et signalement en harcèlement : comprendre la différence
Dans le langage courant, les termes « alerte » et « signalement » sont souvent employés de manière interchangeable. Pourtant, en termes juridiques, ils recouvrent des réalités différentes. Cet article vous aide à y voir plus clair en expliquant simplement et positivement ces distinctions.
Qu’est-ce qu’un signalement ?
Un signalement consiste à informer une autorité ou un employeur d’une situation préoccupante, telle qu’un cas de harcèlement ou de discrimination. Il peut être réalisé par toute personne souhaitant alerter sur des faits irréguliers. Dans le cadre d’une enquête en harcèlement, le signalement peut être le point de départ pour identifier des comportements inadaptés et initier des investigations internes.
Le salarié qui signale : une démarche plus personnelle
À l’inverse, un salarié qui signale des faits de harcèlement le fait avant tout pour se protéger, car il est lui-même victime des agissements dénoncés. Dans ce cas, la démarche est essentiellement centrée sur ses intérêts personnels. Le Défenseur des droits, chargé d’examiner ces signalements, ne retiendra pas la qualification de lanceur d’alerte si les faits ne dépassent pas la sphère personnelle du salarié. Ainsi, lorsque le signalement ne comporte aucun élément démontrant que la situation impacte un environnement plus large ou qu’elle affecte d’autres personnes, il est considéré comme une démarche individuelle et ne bénéficie pas des mêmes protections qu’un lanceur d’alerte.
Quand un salarié victime de harcèlement peut-il saisir le Défenseur des droits ?
Le salarié victime de harcèlement pourra saisir le Défenseur des droits si son signalement présente des éléments démontrant que la situation dépasse ses intérêts strictement personnels. A titre d’exemple, il peut s’agir d’une situation de harcèlement environnemental ou d’embiance sexiste ou discriminatoire.
En effet, le Défenseur des droits distingue clairement les alertes « de la loi Sapin II » qui dénoncent une ambiance générale, impactant l’ensemble du collectif, de celles qui se limitent à des faits isolés affectant uniquement la personne concernée. Dans le premier cas, la démarche peut être requalifiée en alerte, ouvrant ainsi la voie à une enquête en harcèlement et bénéficiant d’un dispositif de protection juridique renforcé. Dans le second cas, le salarié pourra être orienté vers d’autres voies de recours adaptées à sa situation personnelle.
Critère | Alerte | Signalement |
---|---|---|
Qui peut saisir ? | Toute personne (victime ou témoin) remplissant les conditions de lanceur d’alerte (démarche motivée par l’intérêt général et dépassement de la situation personnelle). | Toute personne (victime ou témoin) souhaitant informer sur une situation préoccupante, même si elle est directement et personnalement concernée par les faits. |
Formalité | Doit respecter des règles strictes de l’article 6 et 8 de la loi Sapin II (bonne foi, absence de contrepartie financière) et suivre une procédure spécifique, notamment dans les entreprises de plus de 50 salariés. | Peut être effectué de manière plus informelle via les procédures internes de l’entreprise. |
Cadre légal | Régie par la loi Sapin II avec une protection renforcée pour le lanceur d’alerte. | Protections : Code du travail (articles L1152-2, L1153-2) et renvoi vers la loi Sapin II (articles 10-1 et suivants). |
Délais et traitement | L’employeur doit accuser réception dans un délai de 7 jours et informer le lanceur d’alerte, dans un délai raisonnable (généralement pas plus de 3 mois), des mesures envisagées ou prises. | Le traitement est moins strict, sans obligation de respecter des délais précis pour la réponse ou la mise en œuvre des actions correctives. |
Confidentialité | La confidentialité de l’identité du lanceur d’alerte, des personnes visées et des informations recueillies est impérative. Le lanceur d’alerte peut alerter de manière anonyme. | La confidentialité doit être respectée respectée, mais ces obligations ne sont pas toujours aussi renforcées. Il n’y a pas de mention de anonymat dans le code du travail. |
Protection contre les représailles | Dispositions renforcées prévues par la loi Sapin II (articles 10-1 et suivants) afin de prévenir toute forme de représailles. | Dispositions renforcées prévues par le Code du travail (articles L1152-2, L1153-2) et la loi Sapin II (articles 10-1 et suivants) afin de prévenir toute forme de représailles. |
Les 49 recommandations du Défenseur des droits : présentation générale
- Dans sa décision-cadre du 5 février 2025, la Défenseure des droits émet 49 recommandations, regroupées en plusieurs axes majeurs :
- Le dispositif de signalement : obligation pour l’employeur de définir et communiquer clairement un mode de recueil des plaintes ou alertes en harcèlement et discriminations.
- La procédure d’enquête : mise en place d’une méthodologie transparente, rigoureuse et conforme à l’exigence d’impartialité.
- La protection des victimes et témoins de harcèlements et de discriminations : garantir l’absence de représailles et la confidentialité des informations recueillies.
- La sanction et le suivi : proportionnalité de la sanction, obligation de poursuivre l’enquête jusqu’à son terme et communication sur les résultats.
- La prévention : formation obligatoire des acteurs, détection des signaux faibles, développement d’une culture d’entreprise ou d’administration réactive.
Ces recommandations s’adressent aux employeurs publics et privés, indépendamment de la taille de la structure. Elles s’appuient sur des principes de droit (obligation de sécurité, aménagement de la charge de la preuve en cas de discrimination) et sur des retours de cas concrets étudiés par l’institution.
1. Mettre en place et faire connaître les dispositifs d’écoute et de recueil du signalement
Le Défenseur des droits insiste sur la nécessité pour les employeurs de mettre en place des dispositifs d’écoute et de signalement accessibles, sécurisés et connus de tous. Les dispositifs doivent permettre aux salariés, agents, intérimaires, stagiaires, voire anciens collaborateurs, de signaler des faits de harcèlement ou de discrimination via plusieurs canaux (email dédié, téléphone, formulaire en ligne, etc.). Le Défenseur recommande également une communication régulière sur ces outils, intégrée aux supports internes (intranet, affichage, formations) et externes (offres d’emploi), pour renforcer la confiance et lever les craintes de représailles. Les employeurs doivent en outre garantir la confidentialité des signalements et former les responsables (référents harcèlement, RH) à l’accueil et à l’orientation des victimes.Cas des situations impliquant plusieurs employeurs
Dans certains cas, comme pour les intérimaires, stagiaires ou salariés mis à disposition, plusieurs employeurs peuvent être concernés (entreprise utilisatrice et société de portage, par exemple). Le Défenseur des droits souligne que l’employeur qui reçoit le signalement (ex. : l’entreprise utilisatrice) doit coopérer avec l’employeur contractuel pour enquêter, même si la responsabilité finale incombe à ce dernier. Une enquête conjointe ou externalisée peut être nécessaire. Exemple de dispositifs d »alerte : Un dispositif interne dont la composition serait transparente et portée à la connaissance de l’ensemble du collectif de travail ;- Adresse e-mail dédiée : par exemple, signalement@nomdelentreprise.fr.
- Plateforme ou formulaire en ligne : renforcement de la traçabilité et gain de temps.
- Entretien physique : la cellule d’écoute reçoit la victime présumée ou le témoin pour un premier échange confidentiel.
- Une personne ressource identifiée au sein de l’organisation (référent égalité et/ou diversité, référent harcèlement sexuel, etc.) ;
- Un dispositif porté par un prestataire extérieur.
Recommandation clé :
Communiquer systématiquement sur la procédure : affiches, livret d’accueil, intranet. Une bonne information favorise la libération de la parole.
Focus sur les cellules de signalement :
Critères |
Cellule d’écoute |
Dispositif de signalement |
---|---|---|
Définition |
Instance d’écoute et d’orientation où la victime présumée ou un témoin peuvent s’exprimer sans engagement formel. |
Dispositif permettant de signaler officiellement une situation à l’employeur, entraînant une obligation de traitement. |
Objectifs |
|
|
Composition |
|
|
Qui ne doit pas y participer ? |
|
|
Impact sur le signalement |
|
|
Formation requise |
|
|
Qui peut recevoir et transmettre un signalement ? Quelles sont les sanctions en cas de non-transmission ?
Dans le cadre d’une enquête en harcèlement, le signalement peut être reçu par plusieurs interlocuteurs au sein de l’organisation, mais tous n’ont pas nécessairement l’obligation de le transmettre. La procédure d’enquête harcèlement repose sur une distinction claire entre les personnes habilitées à recevoir un signalement et celles qui doivent obligatoirement le transmettre à la direction ou aux ressources humaines.
Un salarié ou agent public souhaitant signaler un fait de harcèlement en milieu professionnel, qu’il en soit victime ou témoin, peut s’adresser à :
- Son responsable hiérarchique
- Un référent harcèlement ou discrimination
- Le responsable des ressources humaines
- Un dispositif de signalement officiel mis en place dans l’organisation
- Les représentants du personnel
- Un médecin ou psychologue du travail
Toutefois, dans l’emploi privé comme public, les encadrants doivent rendre compte à la direction de l’entreprise ou de l’administration de tout signalement, quelle qu’en soit la forme, provenant de leurs subordonnés et à défaut, leur responsabilité peut être engagée. En cas de non-transmission, leur responsabilité disciplinaire et pénale peut être engagée (Décision Défenseur des droits n°2020-079 du 19 mars 2020).
Interlocuteur |
Peut recevoir un signalement |
Doit obligatoirement transmettre |
Sanctions en cas de non-transmission |
---|---|---|---|
Responsable hiérarchique |
Oui |
Oui |
Responsabilité disciplinaire et pénale en cas de non-transmission |
Responsable des ressources humaines |
Oui |
Oui |
Risque de mise en cause de la responsabilité de l’employeur
Responsabilité disciplinaire
Risque de responsabilité pénale |
Référent harcèlement ou discrimination |
Oui |
Oui |
Sanctions internes si omission volontaire
Risque de responsabilité pénale |
Dispositif de signalement officiel |
Oui |
Oui |
Obligation légale d’accuser réception de signalement pour les employeurs publics
Le Défenseure des droits recommande que l’entreprise privée ou l’administration publique, quels que soient son effectif et le moyen choisi pour transmettre un signalement, en accuse réception auprès du salarié ou de l’agent et lui demande de communiquer, s’il en dispose, tout élément permettant d’appuyer son signalement et de faciliter l’éventuelle enquête : récit chronologique des faits, noms d’éventuels témoins, e-mails et messages, attestations, comptes rendus de réunion ou d’entretien, photographies |
Représentants du personnel |
Oui |
Non (mais peuvent aider à formaliser le signalement) |
Aucune, mais rôle clé dans l’accompagnement des victimes.
Un membre du CSE peut lancer une alerte |
Médecin ou psychologue du travail |
Oui |
Non (sauf cas de mise en danger grave) |
Aucune, mais obligation de conseil et de prévention |
Cellule d’écoute |
Oui |
Non (écoute et information uniquement) |
Aucune, rôle d’orientation et de soutien |
Le signalement peut-il être anonyme ?
Un signalement de harcèlement peut être anonyme et doit néanmoins être pris en compte par l’employeur (page 18 de la décision cadre du Défenseur des droits N°2025-019 du 5 février 2025 ). Le fait qu’un salarié ou un agent public souhaite préserver son anonymat ne doit pas empêcher l’ouverture d’une enquête interne harcèlement, à condition que les éléments transmis permettent une évaluation sérieuse des faits. L’employeur est tenu de considérer la gravité des accusations ainsi que la qualité des preuves fournies avant d’initier une procédure. Lorsqu’un signalement anonyme contient des informations précises et vérifiables, comme des témoignages harcèlement, des courriels, des enregistrements ou une chronologie détaillée des faits, il peut justifier une investigation approfondie. Toutefois, si le signalement est trop vague ou dénué d’éléments concrets, l’enquête pourra être plus difficile à mener. Par ailleurs, la confidentialité des informations recueillies doit être strictement respectée, qu’il s’agisse d’un signalement anonyme ou non.2. La réaction doit être rapide et les délais doivent être maîtrisés
Une procédure d’enquête harcèlement doit être lancée sans délai. Un retard dans le traitement du signalement peut aggraver la situation et encourager l’impunité. Il est donc recommandé d’agir rapidement afin de garantir l’efficacité de l’enquête en harcèlement moral ou de l’enquête harcèlement sexuel. Recommandation : ouvrir l’enquête dans les 2 mois suivant la déclaration des faits. Dans l’hypothèse où le signalement émane d’un représentant du personnel exerçant son droit d’alerte, le code du travail précise que l’enquête conjointe doit être ouverte « sans délai ». En aucun cas, comme l’a affirmé récemment la Cour de cassation, la tardiveté du signalement par rapport aux faits dénoncés ne saurait justifier de renoncer à mener une enquête interne.L’enquête interne doit-elle attendre la procédure pénale ?
Non, l’employeur ne peut pas différer l’ouverture de l’enquête interne dans l’attente du résultat d’une éventuelle procédure pénale. Ces deux procédures sont indépendantes. L’enquête interne vise à déterminer si la discrimination ou le harcèlement sont répréhensibles au regard du règlement intérieur, du Code du travail, du statut de la fonction publique et des règles déontologiques. En revanche, les infractions pénales, telles que le harcèlement sexuel ou la discrimination, répondent à des conditions particulières de qualification définies par le Code pénal.
Ainsi, un classement sans suite, une relaxe ou un non-lieu en justice ne remettent pas en cause la possibilité pour l’employeur de mener une enquête interne harcèlement et de sanctionner l’auteur des faits. Il est également impossible de reporter l’enquête interne en raison d’une procédure en cours devant les juridictions civiles et administratives (conseil de prud’hommes, tribunal judiciaire, cour d’appel).Pourquoi l’enquête interne ne doit-elle pas être retardée ?
Le retard dans l’ouverture d’une enquête interne peut avoir plusieurs conséquences négatives :
- Altération des preuves : avec le temps, les éléments factuels deviennent plus difficiles à collecter.
- Réduction de la fiabilité des témoignages : les souvenirs peuvent s’effacer.
- Poursuite des actes de harcèlement : laisser la situation se prolonger peut nuire gravement à la victime présumée.
- Risque juridique pour l’employeur : l’inaction face à un signalement peut entraîner des sanctions et une mise en cause pour manquement à l’obligation de sécurité.
Peut-on contacter une personne en arrêt maladie dans le cadre d’une enquête interne ?
Oui, la procédure d’enquête harcèlement peut être menée même si la victime présumée ou la personne mise en cause est en arrêt maladie. L’absence d’un salarié ne doit pas bloquer l’enquête, mais toute démarche doit être encadrée avec précaution.
L’employeur ou l’enquêteur peuvent contacter la personne concernée en respectant plusieurs principes clés :- Rappeler que la réponse est facultative : la victime ou le mis en cause ont le droit de refuser de répondre pendant leur arrêt, et ce refus ne peut leur être reproché.
- Proposer plusieurs options adaptées :
- Un récit écrit détaillé envoyé par e-mail ou courrier.
- Un entretien en visioconférence ou par téléphone, si la personne est en capacité d’y répondre.
- Un report de l’audition jusqu’au retour au travail.
- Préserver la confidentialité et le bien-être : aucune pression ne doit être exercée, et l’état de santé de la personne concernée doit être respecté.
Que faire si la personne mise en cause a quitté l’entreprise ?
L’enquête interne doit être menée à son terme même si la personne accusée a quitté son emploi. Cette démarche est essentielle, car elle permet :- De révéler une situation de plus grande ampleur (harcèlement d’ambiance, climat toxique au sein de l’équipe).
- De prévenir la répétition des faits en identifiant des failles dans l’organisation.
- D’améliorer les actions de prévention du harcèlement.
Mesures |
Ce que l’employeur peut mettre en place |
Ce que l’employeur ne peut pas faire |
---|---|---|
Protection de la victime présumée |
|
|
Aménagement du poste de travail |
|
Modifier le poste sans consultation de la victime.
Muter un salarié à la suite de son signalement et en la contraignant à des contre-visites médicales abusives. |
Maintien de la confidentialité |
Restreindre les informations aux personnes strictement nécessaires |
Divulguer l’identité de la victime ou des témoins |
Accès au médecin du travail |
Proposer un accompagnement médical et psychologique |
Ignorer les préconisations du médecin du travail |
Préparation du retour après arrêt |
Anticiper les aménagements nécessaires |
Obliger la victime à revenir sans adaptation |
Suspension temporaire |
Mettre en place une mise à pied conservatoire si nécessaire.
L’employeur devra notamment apprécier si la suspension des fonctions de la personne mise en cause est une mesure plus appropriée que celle de son changement d’affectation dans l’intérêt du service. |
Sanctionner avant la fin de l’enquête |
Mutation temporaire |
Changer d’affectation pour éviter les contacts |
Licencier immédiatement sans enquête |
Respect du principe du contradictoire |
Permettre à la personne mise en cause de se défendre |
Empêcher la personne mise en cause de s’expliquer |
Protection des témoins |
L’employeur doit garantir leur anonymat, les protéger contre d’éventuelles représailles et leur offrir un soutien psychologique |
Exposer les témoins à des représailles, les marginaliser ou les empêcher de témoigner librement |
Interdiction des représailles |
Assurer la protection des témoins contre toute pression |
Sanctionner un témoin pour avoir témoigné |
Accès au soutien psychologique |
Proposer des entretiens avec le médecin du travail |
Exclure les témoins de l’enquête |
Méthodologie d’enquête interne : étapes et principes clés
Formalité de l’ouverture de l’enquête
L’ouverture d’une enquête interne harcèlement est une étape essentielle pour garantir une procédure rigoureuse et conforme aux lois à la Charte de l’entreprise et à la jurisprudence.
– Fixation de la méthodologie et information de l’ouverture d’une enquête
La Défenseure des droits formule plusieurs recommandations pour garantir une enquête transparente et efficace :
- Recommandation 15 : L’employeur doit fixer en amont la méthodologie de l’enquête interne et la formaliser dans une décision officielle après information des instances représentatives du personnel (CSE, CSA, etc.).
- Recommandation 16 : Chaque étape de l’enquête doit être retranscrite par écrit afin de permettre une vérification ultérieure par les instances décisionnaires et les autorités compétentes (juges, inspection du travail, Défenseur des droits).
– Information des parties concernées
L’information des parties impliquées dans une enquête en harcèlement est une question clé. Actuellement, la Cour de cassation ne rend pas obligatoire l’information immédiate de la personne mise en cause. Toutefois, dans un souci d’impartialité et de contradictoire, il est préférable de lui en faire part, sauf si cela représente un risque de pression ou d’intimidation envers les victimes présumées ou les témoins.
Les recommandations de la Défenseure des droits en la matière sont les suivantes :
- Recommandation 17 : En cas d’ouverture d’une enquête interne, la personne ayant signalé les faits, la victime présumée et la personne mise en cause doivent être informées, sauf s’il existe un risque de représailles.
- Recommandation 18 : Lorsque les représentants du personnel sont à l’origine du signalement dans le cadre de leur droit d’alerte, ils doivent être informés de l’enquête et y être associés conformément aux textes légaux en vigueur.
– Obligation de confidentialité
Une enquête harcèlement moral ou enquête harcèlement sexuel implique la collecte et la gestion d’informations sensibles. Pour garantir le respect de la dignité et de la vie privée de toutes les parties, la confidentialité doit être strictement observée tout au long du processus d’enquête.
Les témoignages harcèlement, les documents collectés et les entretiens réalisés doivent rester confidentiels afin d’éviter tout risque de diffusion d’informations pouvant nuire aux victimes, aux témoins ou à la personne mise en cause.
Les recommandations précises sur la confidentialité incluent :
- Recommandation 19 : Le principe de stricte confidentialité doit être rappelé par écrit à toutes les personnes impliquées dans l’enquête. Une attestation de confidentialité doit être signée par les enquêteurs et les personnes auditionnées.
- Des obligations en matière de protection des données personnelles incombent à l’employeur pour s’assurer que toutes les informations recueillies lors de l’enquête restent protégées et ne soient utilisées que dans le cadre strict de l’enquête.
Le harcèlement en dehors du cadre professionnel peut-il être investigué ?
Un comportement pouvant relever du harcèlement psychologique, moral, sexuel ou de la discrimination ne se limite pas nécessairement aux lieux et aux horaires de travail. En effet, certaines situations survenant en dehors du cadre professionnel peuvent avoir un impact direct sur l’environnement de travail et justifier une enquête interne harcèlement.
Objectivité et impartialité de l’enquête : le rôle clé de l’enquêteur
Choix de l’enquêteur
L’une des premières décisions de l’employeur lorsqu’une enquête interne harcèlement est déclenchée concerne le choix de l’enquêteur. Ce dernier doit être en mesure de garantir une procédure d’enquête harcèlement impartiale et rigoureuse. Si les tribunaux laissent aux employeurs une certaine liberté sur ce choix, ils s’assurent néanmoins que la méthodologie utilisée respecte les principes de neutralité et d’objectivité.
L’enquête harcèlement moral ou enquête harcèlement sexuel peut être menée en interne par un service spécialisé (RH, éthique) ou être confiée à un prestataire externe (cabinet juridique, psychologue du travail, avocat). Dans le secteur public, des services d’inspection peuvent être missionnés. Lorsque l’enquête concerne un tiers externe à l’entreprise (client, fournisseur), les employeurs respectifs peuvent organiser une enquête conjointe.
Recommandations pour un choix pertinent
- Recommandation 20 : L’employeur doit garantir l’indépendance de l’enquêteur et s’abstenir d’exercer toute pression visant à influencer le résultat de l’enquête.
- Recommandation 21 : L’enquête doit être menée ou supervisée par au moins deux personnes, afin d’assurer un regard croisé et éviter tout biais subjectif.
- Recommandation 22 : En cas d’association avec des représentants du personnel, ceux-ci doivent être impliqués dans toutes les étapes méthodologiques pour garantir une enquête en harcèlement crédible et légitime.
Impartialité de l’enquêteur : une exigence fondamentale
L’impartialité est un critère essentiel pour assurer la validité des conclusions de l’enquête. Un enquêteur qui entretient des liens avec les parties impliquées ou qui ne possède pas la formation adéquate pourrait compromettre toute la procédure. Il est donc recommandé que l’enquêteur soit extérieur au service concerné afin d’éviter tout risque de conflit d’intérêts.
Points de vigilance
- Recommandation 23 : L’enquêteur ne doit pas appartenir au même service que les personnes impliquées afin d’assurer une évaluation neutre et distanciée.
- Recommandation 24 : Si des membres de la direction ou des responsables RH sont mis en cause, l’enquête doit être confiée à un prestataire externe pour éviter toute suspicion de partialité.
- Cas concrets : La jurisprudence montre que le tutoiement entre l’enquêteur et le mis en cause peut être perçu comme un indice de proximité nuisant à l’objectivité de l’enquête (Décision du Défenseur des droits).
Obligation de formation
L’enquêteur doit être formé aux enjeux du harcèlement en milieu professionnel et aux techniques d’audition. Le Défenseur des droits a rappelé l’importance de disposer d’un personnel qualifié après plusieurs affaires où un manque de formation a nui à la crédibilité de l’enquête.
Critères | Détails |
---|---|
Qui peut être enquêteur ? | Service RH, éthique, cabinet d’avocats, psychologue du travail, inspecteurs de l’administration publique. |
Missions principales | Mener l’enquête en toute impartialité, recueillir des preuves tangibles, interroger les parties concernées, garantir la confidentialité. |
Avec qui mène-t-il l’enquête ? | Représentants du personnel, experts pluridisciplinaires (juristes, psychologues du travail). |
Caractéristiques requises | Indépendance, neutralité, formation en droit du travail et en méthodologie d’enquête, absence de liens avec les personnes impliquées. |
Obligations | Assurer la confidentialité, retranscrire chaque étape, éviter tout conflit d’intérêts. |
Formation | Il est nécessaire que les enquêteurs bénéficient d’une formation juridique et méthodologique avant toute situation de harcèlement. Certaines administrations mettent en place des équipes d’enquêteurs spécialement formés pour renforcer la crédibilité des enquêtes. |
Méthodologie d’enquête interne : étapes et principes clés
- Guide complet pour la conduite des auditions et la qualification des faits
a. Objectifs et importance des auditions
Les auditions constituent la première étape concrète d’une enquête en harcèlement. Leur objectif est de recueillir un maximum d’éléments probants permettant d’établir l’existence ou non de faits susceptibles d’être qualifiés de harcèlement ou de discrimination. Ces entretiens doivent être menés avec rigueur et impartialité afin de garantir la crédibilité de l’ensemble de la procédure.
Les principaux objectifs des auditions sont de :
- Établir la chronologie des faits : recueillir des témoignages sur la séquence des événements, afin de reconstituer précisément le contexte.
- Identifier les témoins directs et indirects : interroger non seulement les personnes ayant assisté aux faits, mais aussi celles qui pourraient apporter des éclaircissements sur l’atmosphère de travail ou l’évolution des comportements.
- Mesurer l’impact sur la victime : recueillir des informations sur l’état émotionnel et les conséquences des faits sur la personne concernée et son environnement professionnel.
b. Choix des personnes à auditionner et conditions de l’entretien
Le choix des personnes à interroger est crucial pour la validité de l’enquête. Il ne s’agit pas uniquement d’auditionner la victime et la personne mise en cause, mais également d’identifier les témoins potentiels parmi :
- Les collègues et pairs : qui peuvent attester des interactions quotidiennes et de l’ambiance générale.
- Les encadrants de proximité : qui ont souvent un rôle clé en tant que superviseurs ou managers et qui peuvent avoir été témoins ou même, dans certains cas, avoir influencé les faits.
- Les personnes ayant signalé des comportements ou ayant eu vent de rumeurs : ces témoignages, même s’ils ne constituent pas des preuves directes, permettent de mieux comprendre l’environnement dans lequel les faits se sont produits.
Pour garantir l’objectivité, les conditions des entretiens doivent être strictement encadrées :
- Neutralité de l’enquêteur : il est essentiel que la personne en charge des auditions adopte une posture impartiale et ne dirige pas les réponses par des questions suggestives.
- Respect de la vie privée : lors de l’interrogatoire, l’enquêteur doit veiller à ne pas porter atteinte à la vie privée des salariés, en évitant d’accéder à des informations personnelles sans accord explicite.
- Cadre sécurisé : les auditions doivent se dérouler dans un lieu calme et confidentiel pour favoriser la libre expression des témoins.
c. L’anonymat et la protection des témoins
Pour prévenir tout risque de représailles, notamment dans les environnements où la hiérarchie peut influencer la dynamique des témoignages, il est parfois nécessaire de recourir à l’anonymisation des déclarations.
Le Conseil d’État a validé cette pratique, qui permet de protéger les auteurs des témoignages tout en préservant la force probante des éléments recueillis. Toutefois, cette anonymisation doit respecter les conditions suivantes :
- Complémentarité des preuves : les témoignages anonymisés doivent être appuyés par des éléments non anonymisés dans le dossier, afin de garantir une vérification lors d’un débat contradictoire.
- Maintien du droit à la défense : la personne mise en cause doit pouvoir consulter l’ensemble des éléments, sans que l’anonymat ne nuise à la confrontation des arguments.
d. La rédaction des procès-verbaux d’audition
La transcription fidèle des échanges est une garantie essentielle de la rigueur de l’enquête. Les procès-verbaux doivent permettre de :
- Retracer précisément les questions posées par l’enquêteur, qui doivent être formulées de manière ouverte pour éviter toute orientation des réponses.
- Documenter intégralement les réponses des personnes interrogées, y compris les précisions sur les faits, le contexte et les ressentis.
- Assurer la cohérence entre les différents entretiens, par exemple en utilisant un questionnaire commun pour l’ensemble des témoignages, afin de comparer les récits et relever d’éventuelles divergences ou points convergents.
Recommandations 27 : Selon la Défenseure des droits, doivent être auditionnés : la victime présumée, la personne mise en cause et les témoins pertinents, y compris les témoins indirects ainsi que les responsables hiérarchiques directs de la victime présumée et de la personne mise en cause.
Le mis en cause devrait être entendu en dernier. S’il cite d’autres témoins potentiels, ces derniers devraient aussi être entendus, sous réserve de l’appréciation de la pertinence par les enquêteurs, étant précisé que le choix des personnes à entendre doit pouvoir être expliqué en cas de recours.
Recommandation 28 : Si la victime présumée ou le mis en cause est en arrêt maladie, la Défenseure des droits recommande que l’audition leur soit néanmoins proposée.
Le rapport d’enquête : contenu, objectivité et transparence
a. Rédaction et contenu du rapport
Le rapport d’enquête est le document final qui compile et synthétise l’ensemble des informations recueillies lors des auditions et de la collecte de preuves. Il joue un rôle déterminant dans la qualification des faits et la prise de décision disciplinaire. Pour être efficace, le rapport doit être :
- Exhaustif et méthodologique : il doit décrire en détail la méthode utilisée pour mener l’enquête, en précisant les étapes, la liste des personnes auditionnées, les conditions dans lesquelles les entretiens ont eu lieu et les types de preuves collectées.
- Chronologique et analytique : une reconstitution précise de la chronologie des événements est indispensable pour comprendre l’évolution des faits et pour identifier les éventuels manquements dans la chaîne de responsabilité.
- Neutre et factuel : l’objectivité est essentielle. Le rapport ne doit comporter ni jugements de valeur, ni appréciations subjectives ou médicalisées, afin de garantir qu’il serve de base solide à toute décision ultérieure.
b. Intégration des éléments de preuve
La collecte des preuves peut inclure divers types d’éléments :
- Documents écrits : mails, notes internes, attestations écrites, comptes rendus de réunions.
- Enregistrements audio ou vidéo : lorsque ces éléments sont obtenus dans le respect du cadre légal, ils peuvent fournir une preuve cruciale, notamment dans des situations se déroulant dans le huis clos.
- Témoignages et attestations : la formulation des témoignages doit être aussi précise que possible pour éviter toute ambiguïté lors de la qualification juridique des faits.
c. Les mesures de traitement proposées
Le rapport d’enquête ne se limite pas à une simple restitution des faits, il doit également proposer :
- Des mesures correctives et préventives : formations, modifications de pratiques ou de procédures internes, suivi psychologique ou accompagnement des victimes.
- Une proposition de sanction : lorsque les faits le justifient, le rapport peut recommander l’engagement d’une procédure disciplinaire, en précisant le niveau de sanction adapté à la gravité des faits constatés.
Recommandations du défenseur des droits :
- Le rapport d’enquête est conservé par l’employeur dans l’objectif de préserver la confidentialité des informations qu’il contient.
- Si le rapport d’enquête recommande des mesures qui doivent être mises en œuvre par la hiérarchie (formation, changement de pratiques…), les conclusions du rapport peuvent lui être transmises.
- Le rapport d’enquête peut être communiqué aux représentants du personnel en charge des questions de santé et de sécurité en version anonymisée et avec l’accord de la victime (et/ou de l’auteur du signalement).
- Néanmoins, selon la Défenseure des droits, une synthèse du rapport devrait être communiquée à la victime présumée qui, à défaut, pourra légitimement douter du traitement donné. Cette synthèse devra rendre compte de la méthodologie suivie, des différentes étapes de l’enquête, des conclusions de l’enquêteur et des décisions prises ou envisagées à l’issue de l’enquête. L’identité des témoins et le contenu de leur témoignage ne devraient pas y apparaître afin de les protéger du risque de représailles.
- Il est également souhaitable que, dans l’emploi public comme privé, le mis en cause et les témoins soient informés de la fin de l’enquête.
Qualification des faits et prise de décision disciplinaire
a. La qualification juridique des faits
La qualification des faits relève de l’autorité disciplinaire, souvent l’employeur, qui s’appuie sur le rapport d’enquête pour conclure à l’existence ou non d’un harcèlement, d’une discrimination ou d’un agissement de nature sexuelle. Pour assurer une qualification juste, il convient de :
- Analyser la gravité des faits : même si certains comportements sont évoqués comme de simples « plaisanteries », ils peuvent, en fonction de leur contexte et de leur répétition, être qualifiés de harcèlement.
- Prendre en compte l’environnement professionnel : le lien de subordination et la crainte de représailles jouent un rôle déterminant, surtout lorsque la victime se trouve dans une position hiérarchiquement fragile.
- S’appuyer sur l’ensemble des preuves : la seule absence de preuve directe ne doit pas faire obstacle à la qualification des faits, dès lors qu’un faisceau d’indices laisse planer un doute raisonnable.
b. La décision disciplinaire
La décision de sanctionner la personne mise en cause est la conséquence logique d’un rapport d’enquête rigoureux et objectif. Dans ce cadre :
- La sanction doit être proportionnée à la gravité des faits constatés et tenir compte de la position hiérarchique du mis en cause.
- Les mesures disciplinaires peuvent être variées : allant d’un simple entretien de recadrage à des sanctions plus lourdes, voire le licenciement, en fonction de l’impact sur la victime et l’environnement de travail.
- L’ensemble des éléments du dossier – témoignages, documents et compte-rendu d’audition – doit être pris en compte par les instances décisionnelles, notamment en cas de contestation devant les tribunaux.
Recommandation 40 : La Défenseure des droits tient à souligner qu’il est indispensable que la qualification des faits fasse l’objet de la plus grande attention et que les enquêteurs et employeurs soient suffisamment formés. L’employeur peut se tourner vers un conseil juridique à ce stade.
Recommandation 41 : S’agissant des agents publics, la Défenseure des droits estime que la qualification juridique doit s’appuyer sur les manquements aux obligations spécifiques liées à l’interdiction du harcèlement sexuel, des agissements sexistes et discriminatoires prévus par le code général de la fonction publique et viser, s’il y a lieu, d’autres manquements figurant dans d’autres textes, tels que les codes ou chartes de déontologie ou dans la jurisprudence.
Procédure disciplinaire et suivi post-enquête
a. La procédure disciplinaire
Au-delà de la simple qualification des faits, l’enquête doit s’inscrire dans une démarche globale de gestion des signalements de harcèlement. La procédure disciplinaire doit respecter les principes suivants :
- Inclusion de la parole de la victime : il est essentiel que la personne s’estimant victime soit entendue lors de la procédure disciplinaire, afin que son témoignage soit pris en compte dans l’appréciation des faits.
- Transparence dans la communication : l’employeur doit informer la victime et, dans une certaine mesure, le mis en cause des suites données à l’enquête. Cette transparence renforce la confiance dans le dispositif interne.
- Sanction de l’inertie hiérarchique : les encadrants ou responsables ayant omis de transmettre ou de traiter un signalement de discrimination doivent également être sanctionnés, afin de garantir l’intégrité de la procédure.
Recommandation 42 : La Défenseure des droits appelle les employeurs à se montrer vigilants et à considérer avec exigence les justifications invoquées par les mis en cause.
Recommandation 43 : La Défenseure des droits recommande également aux employeurs d’avoir une appréciation objective, neutre et loyale de l’ensemble des éléments portés à leur connaissance lors de l’enquête interne et d’en tirer les conséquences sur la qualification des faits.
– L’obligation de sanctionner et la proportionnalité de la sanction
- La sanction doit tenir compte de la gravité des faits : des comportements lourds ou répétés méritent des sanctions plus sévères qu’un manquement isolé.
Exemple : Dans le cas d’un harcèlement répété par un supérieur hiérarchique, une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement peut être justifiée. En revanche, pour un comportement isolé sans impact significatif, un avertissement ou un entretien de recadrage pourra être suffisant. - La position hiérarchique de l’auteur est un facteur aggravant : si le mis en cause occupe un poste d’autorité et que son comportement a un impact plus large sur l’environnement de travail, la sanction devra être renforcée.
Exemple : Un manager qui adopte des comportements discriminatoires affecte non seulement la victime directe, mais aussi l’ensemble de l’équipe. Dans ce cas, une sanction disciplinaire plus lourde, telle qu’une suspension ou un licenciement, peut être envisagée. - L’ensemble des éléments du dossier doit être pris en compte : témoignages, documents et enregistrements constituent une base pour fixer la sanction. L’employeur ne doit pas minimiser les faits sous prétexte d’interprétations erronées, notamment en invoquant le caractère humoristique des propos.
Le fait que le mis en cause soit placé en arrêt maladie n’empêche pas l’employeur d’engager une procédure disciplinaire à son égard. Attention, selon la Cour de cassation, concernant l’emploi privé, le licenciement disciplinaire n’est pas possible à l’encontre d’un salarié déclaré inapte.
b. Le suivi et l’accompagnement des victimes
L’enquête ne s’arrête pas à la décision disciplinaire. Un suivi post-enquête est essentiel pour :
- Accompagner les victimes : un dispositif d’accompagnement psychologique ou un suivi personnalisé permet de limiter les effets à long terme sur la santé mentale et professionnelle.
- Prévenir la récidive : la mise en place d’actions préventives, comme des formations ou des révisions des procédures internes, contribue à instaurer un climat de confiance et de sécurité.
- Informer les parties prenantes : l’information régulière des représentants du personnel et des référents égalité/harcèlement favorise une meilleure prise en charge des signalements et une anticipation des risques.
Recommandation 45 : L’encadrant qui ne transmet pas un signalement de discrimination à l’autorité disciplinaire doit être sanctionné. Ce manquement, en effet, porte atteinte à l’intégrité de la procédure disciplinaire et ne permet pas de garantir la protection des victimes.
Recommandation 46 : Dans l’emploi public, il est impératif d’entendre les victimes présumées lors des procédures disciplinaires engagées contre le mis en cause, conformément à la loi 161. La décision-cadre de 2021 rappelle aux employeurs l’importance de recueillir et de prendre en compte la parole des victimes afin d’assurer un traitement équitable.
Recommandation 47 : Les employeurs, qu’ils soient dans le secteur privé ou public, doivent informer les victimes ayant signalé des faits de l’issue des procédures disciplinaires. Cela permet de lever l’incertitude quant aux sanctions prises à l’encontre de la personne mise en cause et renforce la transparence du processus.
Recommandation 48 : Les employeurs sont invités à rester vigilants quant à la situation des salariés ou agents après la clôture d’une enquête interne. Même si celle-ci reconnaît le statut de victime et identifie les responsables, elle ne garantit pas la poursuite harmonieuse des relations professionnelles. Ainsi, la mise en place d’un accompagnement à long terme est recommandée pour prévenir tout risque de répercussions négatives.
Recommandation 49 : Il est recommandé aux employeurs de transmettre annuellement un bilan des signalements, exempt de données nominatives, aux référents égalité/harcèlement sexuel et aux représentants du personnel en charge de la santé, de la sécurité et des conditions de travail. Ce suivi permet une meilleure transparence et une évaluation continue des pratiques de prévention et de traitement des signalements.
En conclusion, nous espérons que ce résumé vous aura permis de saisir les enjeux essentiels liés à la prévention du harcèlement et à la gestion des signalements en entreprise. Il est fondamental de continuer à investir dans des pratiques responsables pour garantir un environnement de travail sécurisé et respectueux. Pour approfondir ces questions et renforcer vos compétences en la matière, nous vous invitons à découvrir nos formations spécialisées en harcèlement, conçues pour accompagner les professionnels dans la mise en œuvre de solutions efficaces. Ensemble, œuvrons pour un cadre professionnel exemplaire.
Les informations fournies dans cet article sont à titre informatif uniquement et ne sauraient engager la responsabilité de l’éditeur du site. Bien que nous nous efforcions de fournir des contenus précis et à jour, nous ne garantissons pas l’exactitude, l’exhaustivité ou la pertinence des informations. Avant de prendre toute décision ou d’entreprendre des actions basées sur ces informations, il est recommandé au lecteur de vérifier leur validité et, si nécessaire, de consulter un professionnel du domaine concerné.
Formations CIDFP
Sources
Mis à jour le 04/01/2025
Laisser un commentaire